Matthieu Violleau : les Ecuries
de Kerrous à Bodilis
Chloé et Matthieu Violleau ont ouvert en 2005
les Ecuries de Kerrous, à Bodilis. Le centre équestre reçoit
un public composé de débutants et de cavaliers confirmés. Un
groupe de personnes handicapées suit aussi chaque semaine une
séance d'initiation à la conduite de l'animal.
« Nos premiers clients sont aujourd'hui nos meilleurs
cavaliers » ne se lasse jamais de confier Matthieu Violleau.
La satisfaction se lit sur son visage : avec son épouse Chloé,
la trentaine comme lui, il reprend il y a quatre ans les bâtiments
et les terrains d'une ancienne exploitation spécialisée dans
l'allaitement de veaux. « Nous nous sommes rencontrés au moment
du monitorat, le brevet d'état d'éducateur sportif premier degré
en activités équestres, dit-il. Nous avons été salariés pendant
cinq ans avant d'arriver à Bodilis. Je suis originaire de Vendée.
Chloé a des racines bretonnes puisqu'elle vient du Faou ». C'est
grâce à sa mère que Matthieu Violleau s'est pris de passion
pour les chevaux. « Elle montait quand elle était jeune mais
elle n'avait pas eu l'occasion de poursuivre. Elle s'y est remise
avec moi à mon adolescence ».
Aux Ecuries de Kerrous, les chevaux ne se nomment
pas Starlight ou Comanche, comme dans la série TV « Grand Galop »,
mais plutôt Far West, Vera et Jumper. Les deux dirigeants du
centre ont chacun leur spécialité. Chloé a développé les concours
de dressage. Son mari, lui, s'intéresse plutôt aux épreuves
d'obstacle. Le couple participe régulièrement aux championnats
organisés en région. « Nous avons reçu des prix. C'est important
pour l'image du club, et pour voir comment on se situe par rapport
aux autres. L'un de nos objectifs, c'est d'assoir cette renommée »
dit Matthieu Violleau. Le centre équestre possède quarante-quatre
chevaux et poneys, et garde une douzaine d'équidés en pension.
Il n'a ni chevaux purs sang, ni AQPS (« autres que pur sang »)
capables de disputer des courses hippiques, mais uniquement
des équidés de la race Selle Français et des grands poneys.
Le club pratique aussi la reproduction : trois poulains y sont
nés et l'une des juments est à nouveau pleine. Le couple envisage
de mettre prochainement un terme à cette activité d'élevage.
« Nous sommes en phase de stabilisation, par manque de place
et de temps pour nous occuper convenablement des animaux » dit
Matthieu Violleau.
Régulièrement, le club fait appel à des stagiaires,
comme Marianne Breton, en première année de BEPA Elevage à la
Maison Familiale de Landivisiau. « Je sors les chevaux, je nettoie
les box, je fais les soins. J'utilise divers outils comme des
cure-pieds pour enlever les cailloux des sabots, et des brosses
plus ou moins dures pour nettoyer le poil » explique-t-elle.
Ce jeudi de mars, la jeune femme doit seller des chevaux pour
trois résidentes du foyer du Petit Lannouchen de Landivisiau,
qui dépend de l'association Les Genêts d'Or. Une fois par semaine
dans le manège, ce hangar de 700 m2 spécialement dédié à l'initiation,
Virginie, Caroline et Florence font des tours avec leur monture.
Cette « heure de cheval » est toujours très attendue par les
personnes handicapées intellectuelles. « Les filles aiment toucher
les animaux et leur parler. Elles changent souvent de main,
cela leur permet de ressentir différemment l'équilibre. Le cheval
les berce, les calme et leur donne de nouvelles sensations.
Elles sont aussi plus concentrées et ont l'impression de maîtriser
quelque chose » confie leur éducateur, Alexandre Fustec. De
son point de vue, les chevaux et les poneys sont gentils avec
les enfants et les personnes handicapées, même si l'on n'est
jamais à l'abri d'un accident. « Les filles savent qu'elles
peuvent circuler sans danger dans les écuries. Mais elles savent
aussi qu'elles peuvent tomber de leur selle si elles ne suivent
pas les consignes. C'est déjà arrivé, mais sans gravité. Elles
sont surprises, et après elles font attention » dit-il. L'équitation
est pour les résidentes un loisir à part entière, au même titre
que la piscine, le bricolage ou les balades. Cette activité
ne rentre pas dans le champ de l'équithérapie car le cheval
n'est pas utilisé pour aider à soigner les problèmes psychiques.
Outre les personnes handicapées, un public fidèle
depuis l'ouverture, le centre équestre reçoit des enfants du
secteur de Landivisiau, ainsi que des adultes, dont beaucoup
montent sur le tard. Matthieu Violleau juge les Bretons fortement
motivés par la pratique du cheval. « Nous accueillons beaucoup
de femmes, âgées de 20-25 ans, propriétaires de leur animal.
Elles veulent être mieux armées pour faire de la compétition »
explique-t-il. D'autres clients des Ecuries de Kerrous viennent
le soir, pour se détendre, ou pour apprendre à maîtriser l'animal
pour la balade. En tout, 150 personnes fréquentent le centre
équestre chaque semaine. Les cavaliers qui s'inscrivent pour
de l'initiation n'ont pas de cheval attitré. « C'est bien qu'ils
tournent car chaque animal a un caractère différent. C'est à
chacun de s'adapter pour en tirer le maximum » affirme Marianne
Breton. Aux personnes tentées par l'équitation mais qui ont
peur de monter sur un cheval, la jeune femme se veut rassurante.
« Il faut le caresser, lui parler car il sait quand la personne
a peur. Pour l'impressionner, le cheval va faire tout un cinéma
ou se mettre au fond du box. Le cavalier doit se placer au niveau
de son corps pour ne pas qu'il puisse le toucher avec ses membres
postérieurs ».
Entretenir un cheptel coûte cher, à commencer
par l'alimentation de l'animal. Viennent ensuite l'amortissement
du matériel et les soins. A moins de onze euros le cours collectif
d'une heure, les tarifs pratiqués par les Ecuries de Kerrous
se veulent compétitifs. La pratique du cheval n'est donc pas
réservée à un public aisé comme on l'a longtemps supposé. L'équitation
est synonyme de contact avec la nature et avec nos racines rurales,
et ce sport olympique, le troisième pratiqué en France, donne
vraiment aux enfants la possibilité de prendre des responsabilités,
lorsqu'il faut préparer sa monture par exemple. Il les oblige
aussi à bien se comporter en groupe et à développer leurs capacités
psychomotrices. Le Finistère compte une centaine de clubs, soit
un pour trois communes. Un million de personnes pratique l'équitation
en France.